Le déplacement illicite d’enfant à l’étranger
avril 1, 2023
Définition :
Il s’agit du déplacement de l’enfant d’un pays vers un autre sans l’accord de l’autre parent.
La matière a été balisée par la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 qui, dans son article 3, dispose que :
« Le déplacement ou le non-retour d’un enfant est considéré comme illicite :
a) lorsqu’il a lieu en violation d’un droit de garde, attribué à une personne, une institution ou tout autre organisme, seul ou conjointement, par le droit de l’État dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour ; et
b) que ce droit était exercé de façon effective seul ou conjointement, au moment du déplacement ou du non-retour, ou l’eût été si de tels événements n’étaient survenus.
Le droit de garde visé en a) peut notamment résulter d’une attribution de plein droit, d’une décision judiciaire ou administrative, ou d’un accord en vigueur selon le droit de cet État ».
Procédures pour récupérer l’enfant :
A/ Action civile : il faut saisir du problème en urgence le JAF du lieu de la résidence habituelle de l’enfant ;
B/ Action pénale: question réglée par 2 articles du code pénal :
article 227-5 : « Le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »
article 227-7 : « Le fait, par tout ascendant, de soustraire un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l’autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
Très important : la difficulté dépend du lieu où a été déplacé physiquement l’enfant.
Le retour de l’enfant sera plus aisé à obtenir si il se trouve:
1°/ dans un des 27 pays membre de l’Union européenne,
(cf liste ici : https://www.touteleurope.eu/les-pays-de-l-union-europeenne/),
2°/ dans un pays ayant ratifié la convention de La Haye de 1980
(cf liste ici : https://www.hcch.net/fr/instruments/conventions/status-table/?cid=24),
3°/ ou dans un pays avec lequel la France est liée par une convention bilatérale de coopération judiciaire en matière civile,
(cf liste ici : http://www.justice.gouv.fr/justice-civile-11861/enlevement-parental-12063/source-pays-lies-a-la-france-listes-des-etats-de-a-a-l-21122.html).
Par contre, si l’enfant se trouve dans un pays n’ayant signé aucune convention, la tâche sera plus compliquée et semée d’embûches.
Il est préférable de consulter un Avocat qui organisera la procédure pour vous.
Voici un cas récent, intéressant et éclairant ce sujet, dont a été saisie la Cour de Cassation (21 November 2019 – Pourvoi n° 19-19.388), et la façon dont elle a eu à statuer sur cette affaire :
Un enfant est né à Tokyo (Japon) de l’union de M. B. et de Mme X.
Cette dernière est revenue en France avec l’enfant pour un séjour temporaire, puis a déposé, une requête en divorce devant le juge aux affaires familiales.
Soutenant qu’elle avait déplacé leur fils de façon illicite en France, M. B. a saisi l’autorité centrale japonaise d’une demande de retour au Japon sur le fondement de la Convention de la Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants.
Mme X. s’est pourvue en cassation reprochant à l’arrêt d’ avoir ordonné le retour de l’enfant au Japon.
Le 21 novembre 2019, la Cour de cassation relève qu’il résulte de l’article 13, b, de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants qu’il ne peut être fait exception au retour immédiat de l’enfant que s’il existe un risque de danger grave ou de création d’une situation intolérable.
Dans l’appréciation de ces circonstances, les autorités judiciaires ou administratives doivent tenir compte des informations fournies par l’autorité centrale ou toute autre autorité compétente de l’Etat de la résidence habituelle de l’enfant sur sa situation sociale. Selon l’article 3, § 1, de la Convention de New York du 20 novembre 1989, les exceptions au retour doivent être appréciées en considération primordiale de l’intérêt supérieur de l’enfant.
L’arrêt relève que N. est né au Japon et y a toujours vécu, avec ses deux parents jusqu’au mois de juillet 2017, de sorte qu’il ne saurait y avoir pour lui de traumatisme psychologique à retourner dans le pays où il habitait et où demeure sa famille paternelle et observe que la rupture brutale de toute relation avec son père, particulièrement dommageable pour le mineur, a été totalement niée par sa mère.
Il ajoute que le Japon a signé et ratifié la Convention de la Haye du 25 octobre 1980 le 13 avril 2014, que cette ratification a été acceptée sans réserve par la France et qu’il existe en droit de la famille japonais des procédures de médiation, ainsi qu’une procédure de divorce par consentement mutuel. Il a retenu qu’il ne peut être préjugé de la situation juridique susceptible d’être créée par une instance en divorce au Japon.
Enfin, il estime que Mme X. ne justifie pas qu’elle ne pourrait plus séjourner au Japon alors que M. B. formule diverses propositions amiables pour qu’elle puisse y résider avec l’enfant.
La Cour de cassation affirme qu’en l’état de ces énonciations et appréciations, la cour d’appel, qui avait procédé aux recherches prétendument omises, avait statué en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant, justifiant ainsi légalement sa décision.
Interprétation de cet arrêt : l’enfant né au Japon, déplacé par sa mère en France de manière illicite pour cause de mésentente avec le père, a vocation à revenir au Japon où se trouve son centre d’intérêt supérieur.