L’avocat et la dignité
février 20, 2013
L’Avocat en France est soumis à des règles très strictes de déontologie et de publicité, et ce depuis des temps fort anciens. C’est la contrepartie de l’indépendance dont jouit notre profession, et qui peut parfois griser certains au delà du raisonnable…
Il a, par son serment, à respecter notamment un devoir de dignité. La dignité, nous rappelle le Littré, « c’est le respect qu’on se doit à soi-même ».
Certains l’oublient trop souvent, c’est la raison pour laquelle il faut les rappeler à l’ordre.
Par le biais d’Internet, certains cabinets proposent de mettre sur pied des divorces « tgv », rapides, pas chers (99 euros en 3 mois !) et qui peuvent rapporter gros…surtout à leurs concepteurs…!
Nous hommes habitués à utiliser de plus en plus Internet pour faire nos courses, pour acheter nos biens de consommation courante ou pour trouver facilement un horaire de train ou un parcours pour aller d’un point à un autre.
Par contre, choisir un avocat pour se défendre pose un problème de confiance mutuelle et d’honnêteté intellectuelle.
Tout va de plus en plus vite, trop vite parfois. Les justiciables doivent cependant se méfier de ce genre de sites car souvent, les règles de prudence les plus élémentaires ne sont pas respectées.
La justice, on le sait, a besoin de temps pour rendre des sentences équilibrées et qui seront respectées par le plus grand nombre.
Par exemple, en matière de divorce, la présence des parties est requise par l’ Article 1099 du Code de Procédure Civile, qui stipule:« Au jour fixé, le juge s’assure que le consentement des époux est libre et éclairé ». Ceci rend obligatoire la présence de chacune des parties au divorce, au moins une fois lors de cette procédure.
Si l’un des époux est absent, le juge ne peut aller de l’avant tant que cette condition de présence n’est pas remplie. C’est aussi pour cette raison que nous pensons que la présence d’un seul Avocat dans les affaires de séparation dites « consensuelles » peut contribuer à spolier entièrement et définitivement l’un des conjoints, en général celui qui est le plus fragile psychologiquement, ou bien le plus faible économiquement.
Ce qui apparaît le plus économique n’est pas toujours le plus avantageux pour les époux en proie à une procédure de divorce, les intérêts sont souvent divergents et il vaut mieux, surtout en présence d’enfants ou d’un patrimoine important, avoir un Avocat différent pour chacun des époux.
Les conséquences ont parfois désastreuses si l’on a pas pris soin de respecter cette règle, pourtant de bon sens, parfois de longues années après le passage devant le juge, et il ne reste plus alors que « les yeux pour pleurer ».
Tous ces éléments ont conduit la commission plénière de Déontologie du Barreau de Paris à se saisir de ce problème et elle vient de rappeler que:
« – La gestion des dossiers de divorce par internet ne peut qu’être préparatoire à un rendez-vous tenu physiquement avec les clients au cabinet, afin de respecter les principes essentiels.
- La pratique des divorces par internet ne peut s’inscrire dans le cadre des articles 6.6.1 et suivants du Règlement Intérieur National (RIN) qui régissent exclusivement l’activité juridique et non l’activité judiciaire.
En conséquence, la commission plénière de Déontologie considère qu’un rendez-vous au cabinet de l’avocat doit être organisé par ce dernier avec les clients désireux de faire appel à ses services. »
C’est une sage décision. Ce n’est pas parce que le monde tourne trop vite qu’il faut en perdre la raison.
En prenant la peine de convoquer les époux à son Cabinet, l’avocat vérifie en amont du juge si leur consentement est libre et éclairé. Il leur explique la procédure, les rassure et sert de lien avec le magistrat, tout en dédramatisant la situation. S’il perçoit le moindre doute, il doit en informer ces clients et se retirer définitivement de l’affaire, ne pouvant alors rester l’avocat ni de l’un ni de l’autre, puisqu’il les a reçus ensemble.
Ainsi, en respectant toutes ces règles de bon sens, les intérêts de chacun des époux seront préservés, il n’y aura pas de difficulté lors de la rencontre avec le magistrat, et les choses se passeront dans une certaine sérénité, ce qui est une règle d’or lorsqu’on divorce, la situation étant déjà suffisamment traumatisante comme cela.